Communiquer en écosystème
2 Juillet 2025
Cuites, peut-être pas, mais “râpées”, sûrement. Un sondage paru le 26 Juillet sur les intentions de vote aux municipales lyonnaises donne 36% pour Jean-Michel Aulas contre 27 % pour Grégory Doucet. Alors, tout est joué ?
Ne râpons pas les carottes avant de les avoir épluchées. Ce sondage, piloté par Harris Interactive, a été commandité par l’un des candidats, Jean-Michel Aulas et bien sûr, il a fait tester les hypothèses qui l’arrangaient avec les questions qu’il a envie de poser. Les élections sont dans un peu moins d’un an. On ne connaît pas encore les noms des candidats qui seront effectivement présents. Le sondage part du principe qu’il n’y aurait pas d’autre candidat à droite et au centre que Jean-Michel Aulas, rien n’est moins sûr. La campagne n’a pas encore commencé. Or, ça sert à quelque chose, les campagnes. Ça sert à voir quels thèmes vont s’imposer. Ça sert à tester les candidats, Aulas n’est jamais descendu dans l'arène politique, il n’a jamais participé à une assemblée de collectivité, il ne connaît pas bien le fonctionnement des services. La campagne peut le révéler comme bon challenger ou au contraire le mettre en difficulté. Le sondage vient de lui rendre ce mauvais service : en le désignant comme favori, il en fait la cible N°1.
Une autre raison est structurelle. Le sondage fait comme s'il n’y avait qu’une seule circonscription électorale : la commune. Mais à Lyon, comme à Marseille et à Paris, le scrutin se déroule par arrondissement. Il faut élire en tout 73 conseillers municipaux qui sont répartis par arrondissements et il n’y en a pas le même nombre partout. Les 3è et 8è élisent douze conseillers. Les 6è, 7è et 9è : neuf conseillers. Le 5è : huit. Les 2è et 4è : cinq. Et le 1er : quatre. La majorité se fait avec 37 conseillers, ce sont eux qui décideront du maire. Mais comment seront-ils répartis ? Le scrutin est proportionnel avec prime majoritaire. Dans chaque arrondissement, la liste arrivée en tête prend la moitié des sièges + un pourcentage correspondant à son score. A cela se rajoute le fait qu'entre le 1er et le 2nd tour, les listes qui font moins de 5% disparaissent (mais pas leurs électeurs qui peuvent se rabattre sur d'autres candidats). Les listes qui font entre 5 et 10 peuvent fusionner avec d’autres listes si “d'autres listes” sont d’accord. Sinon, elles disparaissent. Les listes au-dessus de 10% peuvent se maintenir. Or dans le sondage la liste LFI peut se maintenir en indépendante (12%), la liste Perrin-Gilbert doit fusionner ou disparaître (6%) tout comme la liste Képénékian (7%). Encore une fois, ce sont des scores globaux pour l’ensemble de la ville alors que les scores qui compteront sont ceux des arrondissements. Que se passera-t-il entre les deux tours? Que se passera-t-il arrondissement par arrondissement? Le sondage ne peut pas le prendre en compte. Suis-je en train de dire qu’il ne sert à peu près à rien? Presque. Il sert tout de même à convaincre Aulas d’y aller et à l’ensemble de la droite de le soutenir, convaincue que le jeu est gagnable.
La troisième raison qui rend ce sondage douteux est qu’il ne prend pas en compte les voix de réserve. On teste Jean-Michel Aulas comme seul à droite et on obtient 36% (alors que d'autres candidats se sont manifestés à droite). Mais on teste les candidats de gauche séparément. Si on cumulait les voix anti-écolo, si la liste Képénékian fusionnait avec celle de Aulas, ce qui est une hypothèse hasardeuse car Képénékian est classé à gauche, on obtiendrait Aulas (36) + Képénékian (7) = 43. Dans le cas contraire, Aulas reste à 36 et quelques. Mais si on fait le même calcul de l’autre côté on obtient Doucet (27) + LFI (12) + NPG (6) = 45. Avec Képénékian en plus, ça passe à 51%. Alors, qui est en tête? Qui le sera ? Le score se fera bien sûr par arrondissement, et les arrondissements de gauche fournissent plus de conseillers municipaux que les arrondissements de droite. Dans tous les cas, on compte que la liste RN se maintient, avec ses 12%. Le jeu est donc beaucoup plus serré que ce qu'on fait dire au sondage.
Beaucoup plus inquiétant pour Gregory Doucet sont les résultats sur l’enquête d’image. Les sondés ont une assez bonne ou très bonne opinion Jean-Michel Aulas pour 55%. Contre 36% pour Grégory Doucet. Sauf dans son propre camp ou la satisfaction est majoritaire. Chiffres confirmés par le score de mauvaise opinion. Elle est de 46% chez Doucet, donc supérieure de dix points aux scores de bonne opinion (36). En six ans de mandat, celui-ci n’a donc pas instauré une relation de proximité avec les Lyonnais, il reste le maire des Verts plus que le maire des Lyonnais. Et toutes les actions en cours de marketing politique destiné à convaincre les Lyonnais qu’ils sont contents n'y changera sans doute pas grand-chose.
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