Communiquer en écosystème
30 Juin 2020
Malgré les coups de boutoir donnés depuis des années par les citoyens dans les urnes et dans la rue, rien ne change ou presque dans ce domaine. Les institutions politiques continuent de :
- faire du “push”, c’est à dire bombarder le public de messages valorisant leur action
- rêver d’une parole monolithique : qu’on n’entende qu’une seule voix
- s’inscrire dans la communication de persuasion, comme la publicité commerciale
- envisager la communication comme un combat qu’il faut gagner contre ses adversaires
A cela s’ajoute cette inébranlable incapacité à écouter qui fait que quoi qu’il se dise, on continue.
Cette parole politique se démonétise de plus en plus, au fur et à mesure que la confiance dans les représentants s’essouflle et que leur usage de “grosses ficelles” les discrédite encore plus. Cette situation est d’autant plus préoccupante que les changements à venir ne pourront être opérés que par la confiance retrouvée….ou par la force.
Mieux encore, le résultat des écologistes aux dernières élections montre une forte attente du public pour une véritable transition écologique, celle dont les autres n’ont cessé de parler mais qu’ils se sont bien gardés de mettre en oeuvre. Car il s’agit d’un changement de niveau 2, selon l’échelle de Bateson : c’est le système lui-même qu’il faut transformer. Un tel changement ne se décrète pas depuis la chambre de Jupiter et il ne se vend pas comme un paquet de riz incollable. C’est l’action de la multitude, l’implication de tous les citoyens qui le mettra en oeuvre. Il doit partir du bas vers le haut et non pas le contraire. Fonctionner sur l’horizontalité, à l'exact inverse des lieux de pouvoirs. Il suppose l’empowerment, c’est à dire qu’on fiche la paix aux gens et qu’on les laisse inventer des solutions.
C’est au politique de poser le cadre et fournir des outils. Mais la communication peut y jouer un rôle déterminant avec trois missions nouvelles :
- connecter les réseaux d’initiatives entre eux
- faire participer, partager
- co-construire les récits
Tous les outils existent. Les “numériques”: plateformes web, intranets, extranets, réseaux sociaux d’entreprise, boîtes à outils de démocratie participatives, médias dédiés. Les “outils humains” : instances de concertation, réseaux, clusters, organisations sociales, instances de concertation, assemblées.
Il manque la volonté politique d’ouvrir le chantier et d’inventer pas à pas de nouvelles façons de communiquer avec les citoyens, non pas en face à face pour convaincre, mais côte à côte pour travailler ensemble.
Il manque l’audace de dessiner une nouvelle architecture de communication. Cette architecture passe par des écosystèmes communicants. Une ville ça communique avec des “communautés” imbriquées les unes dans les autres : un conseil municipal avec un exécutif, une majorité, des oppositions, une administration avec ses services, une population avec ses quartiers, ses arrondissements, des collectivités partenaires comme la métropole, la région, le monde médiatique...qu’est-ce qui est de l’interne, qu’est-ce qui est de l’externe, quel est le rôle de chacun et comment est-ce qu’il communique dans la ville ? C’est cette architecture en écosystèmes communicants qui fera sauter les verrous et mobilisera les énergies.
Le premier sens de “communiquer”, c’est “connecter”. Plus la communication s’ouvre et se met en réseau, plus elle fait entrer de richesse, d'énergie et de diversité. Plus elle favorise la résilience. Cela suppose que le politique accepte que les grandes décision ne se prennent pas par dessus la tête des gens mais avec eux.
Il ne s’agit pas de révolutionner la communication politique, mais de renouer les fils pour lui permettre de se transformer en impliquant tous les acteurs concernés.
Pierre Gandonnière
Docteur en Information et Communication
LinkedIn :https://www.linkedin.com/in/pierre-gandonniere/
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