Communiquer en écosystème
23 Mai 2011
Bien sûr, il ne s’agit pas ici de sciences de la nature, mais d’écologie de l'information. Elle offre ici des outils pour répondre à ces 3 impératifs soulignés par Michel Hébert : mobilité, réactivité, adaptation. Quand un système ne sait plus s’adapter, il sèche sur place, il devient un monument, une pyramide. Ceux qui s’adaptent sont ceux qui s’ouvrent qui acceptent de se laisser transformer, déformer, réformer, informer. L’information, c’est la nourriture du système, il lui donne sa matière et son énergie. Sa vie.
Une organisation où tout chose est bien à sa place, où rien ne circule sans autorisation et uniquement sur les routes autorisées, n’échange guère que des informations mortes. Ou lyophilisées. Aseptisées. Certes, tout y est bien rangé, mais quoi de mieux rangé qu’un cimetière militaire ! Vive les fleurs sauvages, les chemins de traverse, les jardins de curés. Et les abeilles. Qui bourdonnent, passent d’une fleur à l’autre, butinent, sautent les haies. Pas d’abeilles, pas de miel. Il faut faire entrer les ruches dans l’entreprise. Pour accélérer la pollénisation intérieure et extérieure.
Ce n’est pas seulement un système technique, un réseau. C’est un ensemble de gens (ordinateurs?) connectés qui partagent de l’intelligence. Il y a toujours quelqu’un qui sait, quelqu’un qui a l’idée. Surtout, quelqu’un qui prend LA décision et qui FAIT. S’il devait suivre à toutes les liges hiérarchiques qu’on impose en entreprise, il se trouverait toujours quelq’un pour dire : ton idée n’est pas bonne. La réactivité, c’est Droppy à la puissance Nike : “You know what? Just do it”. Le fils d’Adam ont drôlement intérêt à s’y mettre dare dare, à la culture réseau. Les ordinateurs n’attendent pas. En 2020 est prévue le petite singularité, le moment où l’intelligence d’un computeur dépassera définitivement l’intelligence d’un homme. Juste avant la grande singularité, pour 2040, quand l’intelligence artificielle dépassera l’intelligence de l’humanité (d’après Ray Kurzweil). Que voudra dire alors “ intelligence” ?
Les organisations sont faites pour tourner en boucle autour de leurs cercles de pouvoir, comités de direction, groupes de pilotages, services, départements, branche, filiales. Difficile de faire entrer du nouveau là-dedans. Surtout du petit nouveau, du “qui vient pas du sérail”. L’entreprise traditionnelle a été bâtie sur un modèle qui date du Second Empire. Elle est un empire. A l’époque, elle ressemblait au monde extérieur. Mais aujourd’hui ? Celles qui réussissent sont les “maisons à énergie positive”. Celles dont l'intérieur ressemble à l'extérieur. Qui ont su trouver le meilleur équilibre des échanges elles et leur environnement. Celles dont les écosystèmes fonctionnent bien.
Deux clefs pour surfer sur l’imprévisible :
On ne peut pas changer la communication sans changer le mode de fonctionnement des organisations, à commencer, bien sûr, par les boîtes de communication. Les entreprises de l'intelligence et de l’innovation ne peuvent pas fonctionner sur un modèle “d’Organisation Scientifique du Travail”. L’écologie fournit les outils pour comprendre et pour agir . Par exemple la notion de guerre ou de guérilla économique peut être dépassée par le principe de compétition-coopération. On ne cherche pas à détruire les autres concurrents un par un jusqu’à rester le seul...empereur du cimetière. On entre dans un jeu fait de rivalité ET de collaboration, où l’intérêt individuel n’efface pas l’interêt collectif mais où ils se renforcent l’un par l’autre. Comprendre et agir dans des domaines comme : la communication relationnelle, le community management, les réseaux sociaux verticaux, les médias interractifs, les nouveaux territoires virtuels, la culture de la diversité. L’écologie de l’information permet d’agir sur les processus plutôt que d’essayer d’imposer un résultat.
Ce n’est pas difficile, c’est juste un peu déroutant. On ne peut pas comprendre ce monde complexe avec des modèles simple. Par exemple dans la complexité, on peut être ici ET ailleurs comme avec les smartphones et l’informatique nomade. Il n’y a pas de principe de non-contradiction. Une chose peut être vraie et son contraire aussi. Voilà pourquoi contredire tel ou tel point du livre de Michel Hébert ne veut pas forcément dire être en désaccord avec lui. Cela veut dire faire exister à coté de son idée une contradiction, donc créer une dynamique. Comme à propos du temps. Bien sûr qu’il faut être performant sur le temps court. Mais dans le même temps (justement !), il faut reconstituer le temps long, la durée, le passé et le futur, la projection dans le temps et donc pourquoi pas : la science-fiction. Ce qu’il ne faut pas c’est choisir entre les deux, le court et le long. Entre ici et ailleurs. Entre le local et le global. Entre l’individuel et le collectif. Sinon, en effet, on n’a plus le choix qu’entre “trop tôt” et “trop tard”.
Pierre Gandonnière
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