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Communiquer en écosystème

Critiques du “marketing de l’imprévisible” (Michel Hébert) -Episode 2

MichelHebert2





Dans son dernier ouvrage Michel Hébert plaide pour un marketing intuitif, opportuniste, capable de réagir dans un temps très court à tous les changements du monde. Il soulève au moins 3 idées contestables.

 

1 Non ce n’est pas le temps court qu’il s’agit de reconstituer mais le temps long. 

Le marketing était conçu pour bâtir des stratégies à long terme, c’est vrai. Par gros temps, il est aussi difficile à manoeuvre qu’un paquebot dans une baignoire, c’est vrai. Mais pour autant l’économie mondiale file aujourd’hui comme un train fou sans conducteur. Profits à court terme. Réactions à court terme. Est-ce que la solution réside dans l’illusion de vouloir courir plus vite que le vent?  Bien sûr on a besoin de se libérer du carcan du marketing traditionnel. Besoin d’avoir des outils d’adaptation en temps réel. Mais ce qui manque le plus aux entreprises aujourd’hui, c’est de pouvoir penser à nouveau le temps long. Pas pour s’y enfermer. Pour pouvoir s’y projeter. Les grands entrepreneurs ont ceci en commun : ils ne le savaient pas mais ils sont allés quelque part. Il y avait une aiguille aimantée qui les attirait. Nous n'avons plus de temps sur lequel nous projeter pour inventer notre avenir. Nous avons perdu l’an 2000 qui nous servait d’horizon jusqu’à la fin du 20ème siècle. 

 

2. Non l’internet n’est pas un eldorado. 

Bien sûr, Michel Hebert ne le dit pas. Mais comme d’autres il regarde du côté des réseaux sociaux, de l’utilisation des TIC, des nouvelles façons de communiquer. Et il ne veut voir que le bon. Pourtant à y regarder de près, ce n’est pas l’avenir qu’on y invente, mais le pire passé qu’on réveille. L’internet est une jungle de la communication. La  publicité intrusive y règne en maître, le marketing agressif aussi. Le pillage de la vie privée les accompagne. Combien de temps va-til falloir pour que tous ces beaux professionnels arrivent à se faire détester tellement qu’on érigera de nouvelles barrières, de nouvelles réglementations pour cadenasser ce qui furent des espaces de liberté? Facebook devient la plus grande dictature du monde virtuel. Loin le temps où on pouvait y faire à peu près n’importe quoi. Aujourd’hui un profil peut être condamné à mort et exécuté, sans qu’il y ait eu procès, qu’on ait pu se défendre ni même qu’on connaisse les charges retenues contre soi. Flingué par un algorithme aveugle. Où allons nous réinventer de nouvelles pratiques de la communication pour ces citoyens-consommateurs avides de “relations sincères”? 

 

3  Y’a-til moyen de faire autre chose que la guerre? 

Passer de la guerre à la guerilla, pas sûr que ce soit un progrès. Ce serait le temps des snipers, de mines antipersonnelles, des embuscades, des coupe-jarrets. L’espérance de vie de chacun dans un tel monde se raccourcit salement. C’est une chose de constater qu’un mouvement va dans cette direction, une autre de l’accepter comme inéluctable. La guerre de tous contre tous représente un formidable gaspillage d'énergie, de productions de plus en plus éphémères, d’entreprises ouvertes puis fermées, délocalisées puis relocalisées. Un terrible gâchis humain aussi. Et si on bâtissait des stratégies sur autre chose que la guerre? Le principe de compétition-coopération, par exemple (voir épisode 3). 

 

4. Y'a-til encore des modèles de réussite?

 Universal? Mais le monde de l’édition musicale paye justement  le prix de son indadaptation, c’est le contre-exemple parfait. Au lieu de rester branché sur ce qui bouge dans le monde de la musique il s’est soumis aux règne du marketing. Ce qui coûte de plus en plus cher le plus cher ce n’est pas la fabrication du disque mais les efforts qu’on fait pour vendre au public des produits dont il n’a pas envie. Voilà pourquoi il a voulu la loi Hadopi. Pas pour protéger  les droits d’auteurs, cela  ne représente que 7% du prix d’un CD. Pour protéger les droits des majors à contrôler le marché. Et Microsoft, n’est-ce pas un modèle monopolistique? Et PSA? Voilà une entreprise qui a bénéficié de subsides publics pour faire face à la crise. Mais dans la même temps elle reste ancrée dans une stratégie du XXè siècle. Elle mise encore sur le 4X4 pour assurer son développement, et  elle n’est toujours pas prête pour les hybrides et les électriques. Les chinois et les japonais le sont. Il n’y a pas de modèle pour demain ni pour aujourd’hui. Tous les modèles parlent d’hier. 

 

5.Silence !

Paradoxalement, la principale conclusion qu’on puisse tirer du livre de Michel Hébert ce n’est pas qu’il faut communiquer davantage mais qu’il faut ré-apprendre à écouter. Les agences de “communication” devraient devenir des agences d’écoute. La communication triomphante des années 80 autour du mot d’ordre “Communiquez !” est en train de se retourner comme une crêpe. Dans le bruit ambiant on ‘arrive plus à entendre ce que le public veut dire. La force des communicants de demain sera peut-être dans leur capacité à savoir se taire. 

 

 

Pierre Gandonnière


Lire aussi “Michel Hébert et le marketing de l’imprévisible -Episode 1”

 

A suivre Episode 3

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Pierre Gandonnière


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M
<br /> J ai oublié de dire je n ai pas saisi l aspect critique du paragraphe 2 sur Internet et celui sur les modéles de réussite ou j ai eu l impression qu on<br /> disait la même chose<br /> <br /> Et puis j ai oublié de préciser sur le long terme que Bill gates lui même disait n avoir jamais eu de vision, tout comme Mark Z qui avait une simple<br /> idée, tout comme les fondateurs de yahoo... Seul S Jobs ou N Hayeck et quelques rares autres en avaient une....Le probléme avec ce mot c'est qu il<br /> est devenu à la mode et la moindre phrase un tant soit peu incantatoire, ne voulant rien dire devient une vision.<br /> <br /> Vision sans produit, = Zero<br /> <br /> Michel Hebert<br /> <br /> <br />
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P
<br /> <br /> Je ne sais pas si Picasso avait une vision, je sais qu'il a peint les Ménuines des dizaines de fois, essayé et essayé encore, que Robert Comabs disait qu'on ne peint pas avec la tête mais avec<br /> les mains. Et Aragon : "la poèsie ne se fait pas avec des idées mais avec des mots". Nous avons une chance extraordinaire, celle de vire une époque où les choes se bouleversent tellement qu'il<br /> n'y a plus de modèles qu'on puisse reproduire, c'est un nouveau monde qu'il va falloir construire, un monde globalisé et ancré dans son territoire, mobile et enraciné, matériel et spirituel,<br /> individualiste et solidaire, technologique et naturel.<br /> <br /> <br />  <br /> <br /> <br /> <br />
M
<br /> J ai lu l'épisode 1, que j ai trouvé au passage, très bien écrit. J'aime ce style vivant.<br /> Bon j ai compris que les désaccords étaient dans l épisode 2 (et 3 je suppose), donc je vais répondre à tout en même temps si ce n est pas ennuyeux...Mais je vais donner qqs pistes histoire de<br /> jouer le jeu et aussi de préciser des choses<br /> <br /> -A propos du court terme<br /> Je ne dis pas (ou je n ai pas voulu dire) que le court terme était dorénavant le seul objectif qui comptait.<br /> Je pense que l économie fait que les résultats de court terme ont d'une part de l importance, et d'autre part que le long terme est désormais une suite de résultat court terme réussis, car sinon<br /> les actionnaires , "pas être<br /> contents" et les projets sont alors malmenés car ils perdent la confiance des actionnaires: Exemple Carrefour. Ensuite il faut bien admettre que celui qu il faut bien sur une vision , simplement<br /> notons que les chocs de marchés<br /> peuvent remettre en question les visions, et qu il faut alors avoir le courage de s'adapter à le nouvelle configuration de marché.<br /> Au final , je pourrais reprendre la citation du PDG de Nordstrom, la chaîne américaine, qui disait "perdre de l'argent pendant des années pour esperer<br /> en gagner plus tard est totalement ridicule". Les inévitables Apple , Face Book et autres ont bien fonctionné sous la pression des banques de travailler dans le court terme pour démontrer à leurs<br /> financiers que "le truc" était viable. Ils ont même construit leurs offres au fur et à mesure par itérations successives, par expérimentation (CF last chapitre), donc par action successives de<br /> court terme<br /> Pour moi c'est un fait et je pense que les entreprises sont obligés de faire le Paris Dakar, et ne plus penser qu elles peuvent rouler sur l autoroute avec des flèches pour les guider.<br /> Donc tout est pensable et imaginable dans cette course. Cela illustre bien ce qui précéde. On a une vision à long terme, (Dakar), mais pour y arriver il faut arriver entier en bonne position à<br /> chaque étape (Court terme)<br /> <br /> <br /> -A propos de la guérilla<br /> <br /> Difficile pour moi de voir le monde autrement. Surtout cette semaine, où on voit Michelin sortit le pneu increvable (vous rendez vous compte de l impact<br /> de cette innovation sur le marché certes du pneu, mais aussi des garagistes,des équipementiers et des répercussions chomage). Que peut être la réaction des autres????? Une , il faut réagir<br /> immédiatement d'une façon ou d'une autre.<br /> La même semaine La Poste lance une offre mobile défiant toutes concurrences, la réaction va devoir être musclée, et sans compter qu on ne connaît pas encore l offre de Free qui va surement se<br /> situer en dessous de celle de La Poste.<br /> <br /> La même semaine Gap annonce des ventes records , donc il a remonté la pente, mais des profits en Berne à cause de la hausse du court du coton!!!!!<br /> <br /> Et c'est pour cela qu il faut envisager la guerre sous la angle de la guérilla, la guerre était symétrique, le monde est devenu assymétrique et c'est ce qui provoque la guerilla.<br /> <br /> Voilà un bout de réponse Pierre<br /> <br /> J attends l épisode 3 avec impatience et une rencontre avec plaisir et intérêt.<br /> Amicalement<br /> <br /> Michel Hebert<br /> <br /> <br />
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