Les écosystèmes veulent se faire entendre ! Mais à quoi sert de moissonner l'info ?

On dirait que ce jeune homme n’écoute que sa propre musique… à moins qu’il ne s’éveille au monde ? L’écoute n’a jamais autant été d’actualité : entre Gilets jaunes, Grand Débat et élections européennes, le peuple a parlé. Mais il a dit quoi, au juste ? On n’en finit plus de sonder ou de consulter, pourtant le résultat dépend de la méthode et de l’intention.  Ca vaut le coup de mettre deux neurones là-dessus.

L’écoute ou ceux qui misent sur un cap collectif

Cap Collectif (piloté par Démocratie Ouverte ) est la plateforme qui a fourni les outils numériques ayant servi à la fois au Grand Débat (côté gouvernement) et au Vrai Débat (côté Gilets jaunes). Deux débats, un même pilote, et pourtant les résultats ne sont pas les mêmes. L’un de ses fondateurs, Cyril Lage, l’explique : « ils n’ont pas choisi la même application ».

En effet, la plateforme propose six outils allant de la gestion d’un budget participatif jusqu’au classique questionnaire quantitatif. Parmi les six, le gouvernement avait sélectionné la « Boîte à idées » qui a pour intérêt de « stimuler la créativité d’une communauté », pour rechercher des solutions dans un cadre donné sans remettre en cause ce cadre. Les Gilets jaunes avaient opté pour l’application « Consultation » qui vise à  « co-construire une décision ». Mais la décision finale n’était pas de leur ressort et sans représentativité particulière, leurs résultats ne pouvaient être qu’indicatifs. On remarque qu’aucune des deux applis n’était destinée à conduire un « débat ». Pour bien choisir l’outil... il faut être clair sur l’intention.

Faire le bon choix

Sondages et enquêtes d’opinions permettent de mesurer ce que le peuple pense d’une question portée au débat. “Mesurer” l’opinion ou la faire ? De plus en plus de cabinets-conseils s’occupent de travailler sur l’opinion. On parle d’affaires publiques. La profession sent un peu le soufre, car on y voit immédiatement du lobbying. Ce sont pourtant les mêmes méthodes qui aident à faire passer des messages de santé publique : faire l’opinion dans le sens de l’intérêt général. Quant à la notion de “peuple”, Jacky Isabello, cofondateur de CorioLink la récuse. Lui communique en direction de “publics” différenciés, et quand on fait appel à ses services, c’est que ces publics ne sont pas “acquis”. Il faut savoir les écouter pour les connaître, voir comment interagir avec eux. Et donc, avoir une chance de les convaincre.

En écologie de la communication, l’information est comme une nourriture du système.  Il existe six actions qu’on peut mener avec elle :

• Stocker pour plus tard (classer, répertorier)

• Agir (transformer en énergie)

• Transmettre (à qui, comment ?)

• Consommer (transformer en matière)

• Transformer (enrichir, modifier...)

• Combattre, détruire

Six actions possibles et une intention. C’est au client de choisir. Le consultant n’est là que pour accompagner et soutenir sa démarche.  Les questions ‘pour quoi on écoute ? ‘ou ‘qu’est-ce qu’on fait de ces informations ?’ demeurent centrales. Et elles changent ! Elles ne sont pas les mêmes au début, au milieu ou à la fin d’une intervention.  À cet égard, le gouvernement, comme les Gilets jaunes, ont obtenu ce qu’ils voulaient de l’outil qu’ils ont utilisé. Ils n’avaient pas la même intention et pas la même méthode.  

C’est le client qui décide !

Ecouter pour quoi faire ? La réponse du consultant serait : pour éclairer, conseiller, aider à mettre en oeuvre la  décision. C’est le choix du client donc son intention qui détermine le résultat. Ecouter les publics, écouter les clients. Et le jeune homme de la photo a raison : pour bien écouter, il faut commencer par s’isoler des bruits extérieurs.

Pierre Gandonnière