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Communiquer en écosystème

“Pourquoi veux-tu que les gens viennent manger chez toi?”

“Pourquoi veux-tu que les gens viennent manger chez toi?”

Le théorème de Boris

Il y a quelques années, Barnabé*tenait un restaurant à thème. Et comme tous les bistrotiers, il lui arrivait de : “passer à travers”. Pas un client à l’horizon. Il se morfondait : “Pourquoi les gens ne viennent pas? “ Immanquablement, son vieil ami Boris lui rétorquait : “Mais mon petit Barnabé, pourquoi veux-tu que les gens viennent manger chez toi”. C’est Boris qui avait raison.*

Deux logiques s’affrontent.

Celle qui dit : “pourquoi les gens ne viennent pas? Elles cherche des raisons négatives, des excuses. Et elle en trouve : il pleut, c’est la crise, la TVA est trop chère, impossible de se garer dans le quartier. La presse aussi joue du violon : c’est la faute aux gratuits, de toutes façons les gens ne lisent plus, internet a tout ruiné, il pleut. Cela ne sert à rien, les excuses. A part à mouiller des kleenex.

L’autre logique, celle de Boris est plus intéressante, plus dynamique. Elle repose sur le postulat qu’il vaut mieux donner aux gens des raisons de venir que des non-raisons de ne pas venir. En voilà quatre. “Pourquoi veux-tu que les gens viennent manger chez toi ?”

  1. C’est vrai, ils ont de quoi manger à la maison ! La première raison est donc essentielle : leur proposer ce qu’ils n’ont pas chez eux. La bouffe toute prête, ils ont. Des conserves, ils ont. Des trucs à préparer en deux minutes sur un coin de table : ils peuvent en faire autant. Pour qu’ils viennent manger chez toi il faut d’abord qu’ils aient envie de sortir de chez eux. En information, c’est la même chose : tellement d'informations sont disponibles à la maison, qu’est-ce que tu me proposes qui mérite le déplacement?
  2. OK, on m'offre des plats que je ne saurais pas faire moi-même, mais qu’est-ce que j’ai vraiment dans l’assiette ? Méfions-nous : ils regardent les émissions culinaires, ils s’inscrivent à des ateliers de cuisine, ils s’y connaissent de mieux en mieux, ce n’est pas le moment de les truander avec de la “cuisine d’assemblage”. On répète avec la méthode Coué : “je ne travaillerai que des produits frais”, de l’info du marché, ou cueillie directement dans le jardin.

  3. “Les poulets, ça picore toujours au même endroit”. Ca, c’est du Sami Nacéri dans Taxi 1. Ben les journalistes font souvent la même chose. Ils se mettent à cinquante pour traiter le même sujet pendant que le reste de la planète attend qu’on veuille bien s’intéresser à lui. Si tous les restaurants de la rue proposent le même menu lyonnais, ça va vite me courir sur le caillou. En quoi ton offre est-elle différente des autres ? Autrefois, les restaurants affichaient leur spécialités "Maison". Est-ce qu’on est capable de distinguer la "spécialité" de tel journal? Un média qui n’a pas d'identité forte ne doit pas s’étonner qu’on aille picorer n'importe où sans même s’en rendre compte.

  4. ​C’est important l’assiette, mais ça ne fait pas tout. On connaît tous des restaurants où l’on aime aller parce qu’on y est bien accueilli, que le cadre est agréable et que le service est charmant. On n'y vient pas simplement pour se nourrir mais pour passer un moment agréable. En journalisme c’est pareil, on ne devrait pas écrire pour les autres journalistes, c’est la reconnaissance des lecteurs qu’il faut chercher. Méthode Coué niveau 2 : “Je m’occupera bien de mes clients”.

Le voilà, le théorème de Boris. Pourquoi veux-tu que les gens viennent manger chez toi ?

Parce que je ne leur propose que de l’information de professionnel (1), qu’elle est faite uniquement de produits frais (2), qu’elle cherche à se différencier des autres au lieu de se noyer dans la masse (3) et parce que je m’occupe bien de mes clients (4)


*histoire vraie

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Pierre Gandonnière


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M
Bien vu, mais je me demande si Boris n'a pas oublié une petite particularité des media. Le client du media n'est pas celui qui vient consommer l'information. Le client du media, comme l'avait si bien expliqué en son temps Patrick Le Lay, c'est l'annonceur. Le métier du media d'aujourd'hui n'est pas d'alimenter le viewer (lecteur, téléspectateur, auditeur ou autre internaute) en nourriture intellectuelle et culturelle. Son métier est de vendre de l'audience à des annonceurs. Au milieu de la relation primordiale éditeur-annonceur, les créateurs de contenus et les consommateurs sont objetisés au service de la relation marchande. Croyez que je le déplore. Mais c'est comme partout dans notre société moderne, l'argent a perdu sa place d'outil pratique pour monter sur le piédestal de l’idole.
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