Communiquer en écosystème
18 Avril 2017
Le collectif de journalistes We Report est peut-être en train d’inaugurer une nouvelle voie pour le journalisme de demain. Ce n’est plus l’éditeur qui compte mais le producteur.
Traditionnellement, une information est labellisée par son support, c’est une info Libé, ou Le Monde, ou TF1. Sauf qu’avec la diffusion par les réseaux sociaux, il devient de plus en plus difficile d’identifier la source, d’autant que les infos se ressemblent de plus en plus : même sujet, même angle, même style. Et si demain, les supports papier disparaissaient ? Et si demain les chaînes généralistes, en tant que programmateur-éditeur disparaissaient ? Et si demain, les infos sans valeur ajoutées étaient interchangeables (elles les sont déjà) et que le bataille se faisait sur tous
Il resterait des producteurs d’informations, ceux qui auraient su imposer une marque, ou une signature, à forte valeur ajoutée, en plurimédia et qui se serviraient des supports pour éditer leurs contenus sans jamais être prisonnier d’aucun.
C’est ce que tente et réussit le collectif lyonnais (d’origine) We Report. Une équipe de neuf journalistes de Lyon, Strasbourg, Genève, Athènes, Sofia. Ils en avaient assez d’être liés à une rédaction fixe, obligés de passer leur temps à couvrir des sujets qui ne les intéressent pas forcément, dans des conditions qui ne permettent pas de faire un travail en profondeur. Est-ce qu’ils gagnent plus d’argent ? Même pas. Mais comme le dit Mathieu Martinière “on s’éclate dans ce qu’on fait”.
Pigistes ils retrouvent ce qui manque le plus aux médias traditionnels : l’indépendance. Ils négocient au coup par coup avec les journaux les sujets qui les intéressent, notamment les avances de frais. Ils passent le temps nécessaire sur le terrain, seuls ou en équipe ad hoc. Faut-il de l’image, du son, de la vidéo ? Chaque projet peut-être configuré sur mesure. Cela donne des articles en textes, mais aussi des diaporama, des webdocs, des sons radio, des contenus multisupports : bouquin, article, photos….
“Délit de solidarité dans la vallée de Royon”, quand des agriculteurs, pharmaciens, avocats ou curés défient la loi pour venir en aide aux migrants. “Rexistance”, réalisé avec le collectif de photographes Item : des histoires de lanceurs d’alertes, militants, bâtisseurs de lien social, un mélange de textes et d’images. “Réconciliation”, double regard sur la guerre d’Algérie, par les yeux d’un soldat français et d’un combattant du FLN, un reportage radio en long métrage. Les sujets vont de la politique à la culture en passant beaucoup par des questions de société.
Les contenus se retrouvent publiés chez l’éditeur final : Radio FRance (radio), Les InRocks (print), Libé (Print + web), Der Spiegel (print + web), BBC (radio), Médiapart (web), Corriere della Sera (print + web). Mais aussi, et c’est malin, sur le site du collectif, ce qui donne une double visibilité et renforce la marque. Bien sûr, pas fous, chez eux, les journalistes publient en freemium, on n’a accès qu’à l’amorce de l’article, juste de quoi le faire référencer. Pour le lire en entier il faut aller sur le site du client.
Monté en structure associative depuis 2015, We Report donne plus de force et de moyens aux pigistes qui le composent. Il leur offre aussi de la visibilité, l’identité d’une marque. Et si c’était ça, les médias de demain? Si c’était des producteurs d’infos fortement identifiés ?
Voir le profil de Pierre Gandonnière sur le portail Overblog